Pas facile d’apprendre une nouvelle langue, celle du pays où on va vivre, travailler, éduquer nos enfants, développer nos réseaux, prendre soin de nous et de nos proches et vieillir comme tout un chacun!

C’est le défi relevé par les immigrants non francophones qui arrivent au Québec!
Qu’ils arrivent et s’installent comme réfugiés, demandeurs d’asile, travailleurs temporaires, ou déjà avec le statut de résident permanent, l’apprentissage de la langue représente le premier obstacle auquel ils vont se confronter.

Pour que cet apprentissage du français ne devienne pas une montagne infranchissable, voici quelques suggestions valables tant pour les écoles, les enseignant.e.s que pour les organismes communautaires, les voisins, tous les membres de la communauté d’accueil et aussi, bien sûr, pour les personnes immigrantes elles-mêmes!

1. Pour apprendre à utiliser une langue, il faut d’abord apprendre à l’aimer.

Pour mener à bien cet apprentissage, il ne suffit pas d’en comprendre les bases utiles pour survivre dans cette nouvelle société, par exemple pour faire les courses, être en contact avec les administrations ou pouvoir se faire comprendre à l’hôpital. Il est aussi nécessaire que cette nouvelle langue prenne du sens pour les personnes immigrantes, qu’elle ne soit pas seulement une langue utilitaire, mais qu’elle ait aussi, pour eux, une dimension affective.

Toutes les personnes immigrantes, adultes et enfants, veulent pouvoir communiquer dans la langue de leur société d’accueil, mais cet apprentissage demande tant d’efforts et d’énergie, qu’il ne doit pas être uniquement une obligation, mais plutôt un objectif qu’on se fixe, parce que cette langue va nous aider à valider nos objectifs d’immigration pour nous et notre famille, on va se l’approprier et l’utiliser aussi pour nous souvenir de notre histoire et pour nous aider à nous propulser vers un avenir que l’on veut meilleur.

Alors cette langue, on va peu à peu l’aimer!

Des idées d’action

Le projet L’histoire familiale pour apprendre à écrire en français en classe d’accueil, permet à des jeunes de développer leurs apprentissages et leur amour du français par l’écriture d’un journal de leur histoire familiale intégrant des images, des photos et des passages écrits par les parents, parfois dans leur langue d’origine, parfois en français.

Les jumelages interculturels entre familles immigrantes et familles locales peuvent aussi représenter une belle occasion de créer des rencontres et des amitiés en développant cette nouvelle langue.

2. Quand on apprend une langue seconde, on construit sur les bases de notre langue maternelle.

Notre langue maternelle est celle qui nous a bercés depuis notre petite enfance, elle nous habite et on ne l’oublie pas alors qu’on apprend une nouvelle langue. Gardons en tête que si l’immersion est une bonne manière d’apprendre le français, on a besoin aussi de parler notre langue maternelle selon les circonstances et contextes, par exemple le soir à la maison après une journée où chacun a étudié et travaillé en français. En fait, on ne doit pas substituer une langue à l’autre, on doit les additionner, les mettre en dialogue.

Ainsi, on peut remettre en question l’utilisation du terme francisation qui donne l’image d’un bulldozer qui aplatirait et effacerait les langues maternelles.

Des idées d’action

Plusieurs projets et exercices mis en œuvre dans les classes d’accueil ou en éducation populaire permettent ce dialogue, par exemple par la mise en scène de pièces de théâtre intégrant le français avec les langues maternelles des participant.e.s comédien.ne.s.

3. Les personnes immigrantes ont souvent des trajectoires langagières complexes

Plusieurs sont passées par divers pays et ont dû développer des compétences dans d’autres langues avant de s’installer au Québec.
Ainsi, les immigrants peuvent être plurilingues, ce qui représente une nouvelle base pour faciliter l’apprentissage du français. Plus on a appris de langues, plus il devient facile d’en apprendre.

Des idées d’action

Tenir un journal qui rend compte des périodes et des contextes qui nous ont permis d’apprendre ou de côtoyer de nouvelles langues, permet d’identifier comment le français peut trouver sa place dans ce parcours.
Valoriser le plurilinguisme à l’école et dans la société va aussi favoriser l’ajout de cette nouvelle langue.

4. Différentes façons d’apprendre le français

On n’apprend pas le français de la même manière et cela prend plus ou moins de temps selon notre âge, selon notre statut familial, selon notre niveau d’éducation dans notre langue maternelle et dans notre pays d’origine, selon notre réalité socio-économique et selon nos compétences professionnelles.

Par exemple, plus on est âgé et moins, on est allé à l’école dans sa langue maternelle, plus il sera difficile d’apprendre le français même en y mettant beaucoup de volonté et d’énergie.

Par ailleurs, si on est en situation de grande précarité financière ou inquiet sur le sort de notre famille, on sera moins focalisé sur nos apprentissages qui deviendront plus difficiles et plus lents.

Ainsi, il faut développer une perspective intersectionnelle qui croise ces différentes dimensions pour mieux accompagner les personnes allophones dans leur apprentissage du français.

Des idées d’action

D’abord, l’offre de cours de français doit être adaptée à ces besoins différents, souple et prenant en compte les rythmes et contextes de chacun.
À l’école, dans le milieu communautaire et dans les cours pour adultes, on devra développer une pédagogie différentielle, des activités par petits groupes, du mentorat par exemple par domaine professionnel, des activités d’éducation populaire et des activités interculturelles visant des rencontres et des échanges.

5. L’apprentissage d’une langue passe par plusieurs étapes à l’oral et à l’écrit

On aborde en premier les apprentissages linguistiques de base, soit le vocabulaire, les structures de phrase, les conjugaisons. Puis on a une phase d’intégration, ces notions s’inscrivent dans nos apprentissages, nos langues, notre culture précédente, prennent sens pour nous. Finalement, il y a l’étape de la mobilisation où on est à même de discerner quelles ressources linguistiques utiliser, comment passer d’un registre à l’autre, faire de l’humour par exemple.

Ces étapes sont parcourues à des rythmes différents selon les personnes et les conditions d’apprentissage.

Des idées d’action

Il est pertinent d’ouvrir les cours de langue sur la communauté et la société. Par exemple, des parents peuvent aller dans les classes des enfants pour expliquer leur profession ou leur parcours, et ces exposés font partie intégrante de leur programme d’apprentissage.

De même, les programmes linguistiques doivent autoriser et valoriser, comme apprentissage, tout type d’échanges et de rencontres qui permettent aux personnes de devenir elles-mêmes en français.???

6. Sept conseils pour les membres francophones de la société d’accueil

  • Écouter, ouvrir nos oreilles et notre esprit;
  • S’habituer aux accents divers, nous avons chacun le nôtre;
  • Ne pas infantiliser les personnes qui ne maîtrisent pas complètement ou pas encore le français;
  • Éviter de hausser la voix, les immigrants allophones ne sont pas sourds;
  • Être patients et les laisser s’exprimer;
  • Parler lentement et ne pas hésiter à répéter, si nécessaire;
  • Faire répéter et corriger s’il y a des erreurs, mais pas de manière trop insistante. Il y a un temps pour tout!!!

En conclusion

Michèle Vatz-Laaroussi

Michèle Vatz-Laaroussi, docteure en psychologie interculturelle, est professeure émérite associée à l’École de travail social de l’Université de Sherbrooke, où elle a enseigné pendant 25 ans. Elle figure aussi au nombre des chercheurs partenaires du SoDRUS (Centre de recherche Société, Droit et Religions de l’Université de Sherbrooke) et est membre de l’Observatoire des Profilages. Elle est reconnue pour son engagement envers les enjeux d’immigration et d’inclusion sociale.

Les travaux de Madame Vatz-Laaroussi ont fait avancer les connaissances sur la médiation interculturelle, domaine auquel elle a contribué en développant des approches novatrices pour favoriser l’intégration des populations immigrantes dans les communautés locales.

En reconnaissance de l’impact international de ses recherches sur l’immigration dans les régions du Québec, elle a reçu le prix Hector Fabre en 2017, décerné par le ministère des Relations internationales et de la francophonie du Québec. 

Ses projets de recherche-action et ses démarches participatives l’ont également menée à collaborer avec des comités citoyens et des organismes communautaires, travaillant de manière collaborative pour répondre aux défis sociaux et culturels liés à l’immigration.

Depuis 2020, Madame Vatz-Laaroussi a également participé à des études sur le racisme et les discriminations dans les municipalités québécoises, hors Montréal, contribuant à enrichir le dialogue et les pratiques en matière d’équité et d’inclusion. Elle est co-autrice de plusieurs ouvrages importants, notamment Femmes et féminismes en dialogue : enjeux d’une recherche-action-médiation (2019), Visages du racisme contemporain. Les défis d’une approche interculturelle (2021) et La médiation interculturelle. Aspects théoriques, méthodologiques et pratiques (2022). Ces publications témoignent de son engagement pour une société inclusive et de sa vision pour des pratiques interculturelles ancrées dans la réalité des communautés locales.

C’est un honneur pour L’ANCRE de compter sur la collaboration de Michèle Vatz-Laaroussi, qui partage son expertise et ses perspectives éclairantes en contribuant à nourrir notre blogue.

Soirée spectacle avec Carine au micro

Une soirée riche en découvertes. Venez souligner le Mois de l’histoire des Noirs avec L’ANCRE, le CAE Haute-Montérégie et la CCIHR, à La Boîte, à Saint-Jean-sur-Richelieu.

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Les bureaux seront fermés du 23 décembre au 7 janvier.

Toute l’équipe de L’ANCRE vous souhaite de joyeuses fêtes.