
Le service L’ANCRE œuvre depuis plusieurs années pour favoriser l’intégration des personnes immigrantes et le rapprochement avec la communauté d’accueil. Parmi les activités proposées, le programme de jumelage interculturel occupe une place particulière.
Il permet à de nouveaux arrivants d’être accompagnés, pour quelques mois, par un « jumeau » ou une « jumelle » bénévole, pour privilégier l’échange culturel, faciliter l’intégration et créer des relations authentiques.
L’an passé, 15 rencontres ont été organisées dans ce cadre et trois personnes ont bénéficié d’un jumelage. Derrière ces chiffres se trouvent des histoires humaines riches, tissées de partages, d’entraide et de sensibilisation. L’une de celles-ci est celle de Joan Thompson, une bénévole dont l’expérience illustre bien l’esprit du programme.
Née à Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, Joan Thompson vit depuis très longtemps à Saint-Jean-sur-Richelieu et se considère aujourd’hui pleinement comme une Johannaise. Elle a fait carrière comme professeure d’anglais langue seconde. Elle a d’abord travaillé à la base militaire, puis au cégep, auprès des jeunes. Elle parle de son métier avec bonheur :
« C’était vraiment intéressant, j’ai beaucoup aimé ça. J’ai quitté avec regret, mais il fallait laisser la place aux plus jeunes. »
À sa retraite, Joan ne se voyait pas rester inactive. Cherchant une façon de continuer à contribuer à la communauté, elle est tombée sur un article parlant de L’ANCRE. Curieuse, elle a pris contact et s’est engagée comme bénévole en 2017. Depuis, elle participe activement au programme de jumelage interculturel.
Le rôle essentiel d’un jumelage
Au fil du temps, Joan a développé une fine compréhension du rôle de jumelle. L’essentiel? Être une présence bienveillante, attentive et constante.
« Je suis là pour les accompagner, les écouter, les aider à améliorer leur français et les référer vers les bonnes ressources lorsqu’ils en ont besoin » me partage-t-elle.
Chaque moment contribue à briser l’isolement et à favoriser l’intégration.
Pour Joan, ces moments sont enrichissants non seulement pour les nouveaux arrivants, mais aussi pour la communauté d’accueil :
« Quand je parle avec ma famille de la réalité des personnes immigrantes, ça ouvre les esprits. Les gens comprennent mieux pourquoi quelqu’un quitte son pays : au fond, on cherche tous la même chose, une meilleure vie pour soi et pour ses enfants. »
Être jumeau ou jumelle, c’est aussi savoir trouver le bon équilibre entre proximité et respect du cadre. Par générosité, on est parfois tenté de dépasser son rôle, alors pour éviter ces situations; Valérie Huppé et Monica Ubidia, responsables du jumelage interculturel, organisent des rencontres de jumeaux et jumelles. Ces moments permettent d’expliquer clairement ce qui peut être fait : accompagnement, conversation, références vers des services et ce qui dépasse le cadre du jumelage. Ces échanges renforcent les bénévoles et leur donnent des outils pour rester disponibles sans se sentir envahis.
Des liens difficiles à rompre
En principe, le jumelage dure environ trois mois. Pourtant, Joan avoue avoir parfois du mal à couper les ponts :
« On établit des liens, ce n’est pas qu’une relation fonctionnelle. On entre dans la vie des gens et on connait des histoires, et il est parfois difficile d’arrêter la relation. Mais il faut se rappeler que d’autres personnes attendent aussi notre aide. » Me confie-t-elle.
Cette dimension émotionnelle rend l’expérience particulièrement riche : chaque rencontre devient une petite fenêtre ouverte sur une autre culture, une autre histoire de vie.
Plus qu’un programme
À travers des témoignages comme celui de Joan, le jumelage interculturel de L’ANCRE révèle sa véritable force : il ne s’agit pas seulement d’un accompagnement pratique, mais d’une rencontre humaine. Pour les nouveaux arrivants, c’est une main tendue dans un moment d’incertitude. Pour les bénévoles, c’est une ouverture sur le monde, sans quitter sa ville.
Pour devenir bénévoles : JUMELAGE INTERCULTUREL
Chronique du Quartier, parue dans le journal Le Canada Français, le 18 septembre 2025, écrite par Émilie Rey.